Les Etats réunis à Genève depuis dix jours ne sont pas parvenus à trouver un accord permettant de lutter contre la pollution plastique....
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Bienvenue dans l’absurdité carcérale genevoise. Vers la fin de mon séjour en prison, j’ai écrit à plusieurs reprises au grand chef de l’époque, Pierre Maudet, pour signaler des dysfonctionnements kafkaïens, dont vous trouverez un florilège ici. Les réponses étaient décevantes, mais j’ai tout de même réussi à améliorer le sort de mes camarades d’études avant de changer de vie, de rembourser sans relâche la montagne de dettes qui attendent les détenus à leur sortie et d’écrire ce récit, dont voici le dernier épisode. Note de la rédactionLes faits ici décrits sont le résultat d’une expérience substantielle de la prison chez l’auteur: quatre ans à Champ-Dollon, presque un an à La Brenaz. Avec nonchalance et humour, celui-ci s’attache à dévoiler le fonctionnement et la vie quotidienne de l’institution carcérale. Autrement dit, tout est vrai. Bon séjour!Je vous racontais qu’à Champ-Dollon, je m’étais porté volontaire pour rédiger les courriers de certains de mes camarades d’études à l’Université du crime, incapables de lire ou d’écrire en français. Une fois à La Brenaz, pour mes onze derniers mois de détention et comme chef de secteur élu à l’unanimité, je me suis mis à écrire moi-même, consciencieusement et à la main, puisque tout matériel informatique nous était refusé.Ainsi, le 12 février 2017, en vertu de l’article 235 al. 5 du Code de procédure pénale, je me suis permis d’adresser à Pierre Maudet, Conseiller l’Etat en charge de la sécurité et de l’économie, une missive de trois pages avec un florilège d’interdictions absurdes issues d’un règlement qui change au bon vouloir du directeur. Ce n’était pas ma première lettre et à chaque fois, la réponse semblait avoir été écrite par ChatGPT, même si cela n’existait pas à l’époque. Boire de l’eau: interdit Premier exemple: les bouteilles d’eau. On peut en acheter par pack de douze à l’épicerie, mais on n’avait pas le droit de les emmener sur notre lieu de travail, ou on passe l’essentiel de la journée. Logique, non? Le prétexte, c’était qu’il y avait des points d’eau partout, alors que ce n’était pas le cas. Idem pour les parloirs: pas le droit de boire de l’eau, y compris pour les enfants qui viennent voir leurs parents. Dès le lendemain, cette interdiction a été supprimée, merci M. Maudet!Au parloir encore, pas le droit d’aller aux toilettes pendant la visite de deux heures, y compris pour les enfants. On a protesté, l’accès a été autorisé mais signifiait alors que la visite s’arrêtait là, avant le temps réglementaire. Dans les prisons genevoises, il faut choisir entre le pipi et la famille. Idéologie en béton Autre exemple, plus coriace: la fermeture des fenêtres. Je ne parle pas d’enlever les barreaux, mais de laisser passer un peu d’air. Sauf que La Brenaz est un bâtiment Minergie, qui fonctionne toutes fenêtres fermées. Résultat: en été, trois détenus, moi compris, dans la salle de fitness. On faisait du vélo et de l’endurance sur un tapis de course. On a fini avec vomissements et vertiges, sous assistance respiratoire. Il faisait 39,5 degrés dans la pièce. Il a fallu l’intervention des ambulanciers et diagnostic de manque d’oxygène pour que la direction autorise l’ouverture des fenêtres… tout en gardant le label écologique. La planète, oui ; les détenus, moins.Sur ce sujet, Pierre Maudet ne pouvait que défendre le bâtiment qu’il a fièrement inauguré. Il a répondu: «l'établissement La Brenaz, réalisé en 2015, est entièrement équipé d'un dispositif de ventilation “double flux”, soit la pulsion et l'aspiration de l'air ambiant. Cette technique permet une ventilation contrôlée d'un bâtiment construit avec l'objectif de haute performance énergétique exigé par la loi.»Fermer les fenêtres, à La Brenaz, c’est une idéologie en béton. Le 25 janvier, on m’a demandé, à moi et deux camarades, de repeindre au pistolet une salle très haute de plafond. J’avais dit au gardien que si les fenêtres restaient fermées, on allait suffoquer. Il a ordonné de faire comme il a dit. Alors on a peint, on s’est mis à tousser, on a senti des maux de tête mais on a reçu l’ordre de nous taire et de continuer de peindre. Heureusement, au bout d’un moment, l’alarme incendie s’est déclenchée à cause des vapeurs de peinture. Les pompiers ont débarqué, toutes sirènes hurlantes. Musique classique: interdit Là, Pierre Maudet s’est montré bien rigide. «L'intervention des pompiers est le résultat du comportement inadéquat de plusieurs détenus (de la peinture avant été giclée sous un détecteur de fumée), et ne relève aucunement de la responsabilité de la direction de l'Etablissement La Brenaz», a-t-il écrit.C’est faux, évidemment, on n’allait pas asperger le détecteur! Je me suis donc permis de lui répondre: «sachez que malgré vos réponses à mes lettres, rien ne change ici, et vos réponses sont celles de la direction qui ne correspondent en rien à ce qu’on vit ici.»Le plus joli, c’est quand j’ai commandé, dans le catalogue de la prison, deux CD de musique classique. J’aime bien, ça m’apaise. Hé bien ils ont été bloqués à l’entrée, je ne les ai jamais reçus. J’ai posé des questions, on m’a dit que c’était interdit. Interdit, Vivaldi? Ennemi numéro un, Chopin? Le rap je veux bien, mais le classique? Il a fallu un échange de courrier avec le Conseiller d’Etat pour que je puisse écouter les Quatre Saisons. Entretiens confidentiels mais filmés Interdits aussi, les produits Yves Rocher. Pourquoi? Allez comprendre. C’est juste de la prison parfumée à la frustration. Après moult courriers et refus de travailler, certaines interdictions ont sauté. Merci qui ? Merci les détenus et merci Pierre Maudet, qui a fini par être informé, mais pas trop vite.Après, il y a des choses dignes de 1984 de George Orwell. Par exemple, mon avocat, Me Assaël, avait envoyé une collaboratrice pour me voir. Elle s’est aperçue que la pièce où nous devions parler était équipée d’une caméra de vidéosurveillance. C’est totalement illégal, les entretiens sont confidentiels. Le rendez-vous a été annulé illico par l’avocat, qui a cru à une caméra cachée. Raté, c’était de la téléréalité. Règlement inaccessible et capricieux A La Brenaz ces interdictions nous tombaient dessus sans que personne comprenne vraiment pourquoi. Quand on protestait, quand on demandait aux gardiens, voire à un chef de service lorsqu’on en croisait un (ce qu’était rarissime), si on pouvait consulter ce fameux règlement, hé bien la réponse était plus surprenante encore que les interdictions elles-mêmes: Il est en ligne sur Internet! Sauf que personne en prison n’a accès à Internet. Kafka, sors de ce corps! Cela, les gardiens et les chefs le savaient très bien mais bon, lorsqu’on est sadique, on l’est jusqu’au bout des ongles. Par conséquent, personne ne savait ce que ce règlement contenait vraiment. Il a fallu organiser plusieurs blocages d’étages par mes camarades ainsi que des refus de travailler pour débloquer la situation et on a pu enfin avoir à tous les étages l’affichage de ce fameux règlement interne de La Brenaz. Je vous épargne les détails tellement il est absurde, je vous donne juste la dernière phrase, des plus savoureuses, qui vous aidera à comprendre comment cette Université du Crime fonctionnait et fonctionne toujours… Cette liste n’est pas exhaustive et peut être modifiée à tout moment sans préavis. La sécurité juridique version patate chaude. Demain, on interdira peut-être de respirer, qui sait. Les artistes du «Tout sécuritaire» Parmi toutes les aberrations, la plus importante reste la surpopulation carcérale, qui fait des lieux de privation de liberté à Genève de véritables laboratoires de l’absurde où l’on expérimente la souffrance humaine sous supervision administrative. Qui sont les architectes de ce chef-d’œuvre d’inhumanité? Trois artistes du «tout sécuritaire» : l’avocat et politicien Christian Lüscher, le procureur général Olivier Jornot (expert ès condamnations à la CEDH) et le politicien Pierre Maudet (ex-ministre, ex-homme providentiel, ex-exemplaire). Trois candidats au Nobel du cynisme, qui incarcèrent à tours de bras mais n’assument pas lorsque cela dérape, que l’on a des émeutes, des suicides et des condamnations à la CEDH pour de la surpopulation chronique.Les deux premiers ont réussi un joli coup électoral en 2007, pour servir leurs ambitions respectives. Olivier Jornot est alors simple avocat et député au parlement cantonal mais rêve d’être élu conseiller d’Etat. Cela ne marchera pas mais il sera élu en 2011 procureur général et compte se représenter comme «shérif de la république» en 2026. Christian Lüscher, lui, avait des ambitions nationales. Si bien qu’en 2007, ils font adopter une loi mal ficelée pour interdire la mendicité (elle sera déclarée illégale dix-huit ans plus tard par le Tribunal fédéral). Elle vise les Roms qui tendent la main dans les rues de Genève. L’acte est punissable d’une amende, mais comment faire payer des gens sans le sou? A force de ne pas payer, ils se retrouvent nombreux en prison. L’avocate Dina Bazarbachi a déclaré récemment dans la Tribune de Genève: J’ai défendu une cliente qui a passé 1400 jours de détention pour avoir mendié: c’est une mère de famille, il ne faut pas l’oublier. Champ-Dollon est remplie de mendiants qui, parfois, reçoivent plusieurs amendes le même jour. Genève, capitale de la sévérité Pour ma part, je me souviens d’un détenu Rom en chaise roulante, amputé des deux jambes. Pour aller en promenade, c’était un parcours du combattant lorsque l’ascenseur ne fonctionnait pas. Les détenus se mettaient à plusieurs pour le descendre par les escaliers depuis le 2e étage. Ensuite, je vous laisse imaginer le plaisir de circuler en chaise roulante sur un terrain plein de trous, où on peut se fouler une cheville rien qu’en marchant. Il était en prison pour n’avoir pas payé plusieurs amendes parce qu’il mendiait. Genève est le seul canton suisse à être aussi sévère.Après les émeutes de 2014, le Tribunal fédéral a condamné Genève parce que Champ-Dollon n’offrait pas des conditions de vie humainement acceptables à ses détenus. «On ne peut pas entasser des êtres humains comme du bétail!» a lancé l’avocat Robert Assaël. Il y avait 900 détenus à l'époque dans une prison prévue pour 370, dont les trois quarts étaient sans travail. «C'est cette poudrière-là qui a explosé.» La recette pour remplir la prison Conséquence des émeutes, les repas en commun ont été supprimés. C’était un rare moment de socialisation. Parce que rien ne vaut un bon isolement pour faire éclore l’esprit citoyen du détenu. Les repas en commun n’ont pas été rétablis avant plusieurs années.C’est que le duo Lüscher-Jornot a ensuite été remplacé par un duo Maudet-Jornot, qui ne se sont entendu que sur un point: il faut enfermer le plus possible. Le premier a appliqué de façon très restrictive la loi sur les manifestations. Le second a infligé des peines de prison ferme à des étrangers pour «séjour illégal». A eux deux, ils ont fait déborder Champ-Dollon. Le paradoxe Maudet Pierre Maudet, ministre cantonal de 2012 à 2021, puis à nouveau depuis 2023, surnommé à l’époque «Monsieur Sécurité». Il y a pourtant un paradoxe: Pierre Maudet est lui-même champion des infractions pénales. Impossible ici de ne pas rappeler ses exploits: Voyage tous frais payés à Abu-Dhabi en 2015: nié, reconnu, re-nié, re-reconnu… Le grand chelem du mensonge politique. Il a naturalisé en express un de ses amis, un banquier libanais qui avait organisé son voyage à Abu-Dhabi. Il a conclu un deal secret avec Uber en acceptant de fermer les yeux sur leur expansion à Genève Il a oublié de déclarer certains revenus aux impôts genevois. Il a été amendé pour cela. La faute à la complexité administrative, bien sûr! Condamné en 2021 pour acceptation d’un avantage, relaxé partiellement en appel, mais la réputation, elle, est restée en cellule. Il a accepté des dons anonymes pour sa campagne de 2023, ce qui est illégal. Il a de drôles d’amis à Vernier qui ont organisé un bourrage des urnes en faveur de son parti aux élections communales de mars 2025. On aurait aimé voir Pierre Maudet, «Pierrot» comme on l’appelait, venir vivre avec nous la détention qu’il a organisée, avec 3,83 m2 d’espace vital. Il s’est contenté de la case tribunal. Dommage, le label Minergie lui aurait peut-être inspiré une réforme… ou un roman. Moralité: à Genève, on punit, on enferme, on réglemente. Mais surtout, on invente chaque jour de nouvelles façons de rendre la vie impossible, pour les détenus mais pas pour les élus condamnés. Et quand le Tribunal fédéral ou la Cour européenne des droits de l’homme s’en mêlent? On s’en fiche, on modifie la liste d’interdictions sans préavis, on raccourcit les cellules ou on les rallonge, c’est selon. Bienvenue dans le canton où le règlement est roi, l’absurdité reine, et la réinsertion… une légende urbaine. Epilogue Ma sortie de prison a eu lieu en mars 2017. Sortie sèche, comme on les appelle dans le jargon pénitencier. Aucun plan de réinsertion sociale, aucun logement, pas d’emploi, rien. Je sors comme je suis rentré, à poil. En plus, quand on sort, on a des dettes. Mes loyers de l’époque n’ont pas été résiliés rapidement après mon arrestation: il a fallu rembourser. Rembourser aussi des frais dentaires et médicaux durant les années de détention, rembourser encore des expertises faites par la justice durant l’enquête, des frais de justice et plein d’autres prestations pour plus de 80’000 francs au total.Certains auraient replongé illico dans la délinquance pour survivre à cette situation des plus précaires. J’ai décidé de ne pas le faire, de rester dans le doit chemin, de rembourser sans relâche et de profiter au maximum de ma liberté retrouvée pour revoir mon fils après des années. J’en suis toujours là et je n’oublie pas que les leçons le plus durement apprises sont celles qui restent gravés à tout jamais dans nos cœurs et mémoires.Une pensée pour toutes les détenues et détenus décédées dans les prisons en Suisse.Un grand merci à mon fils Alex, à Serge Michel et Marc Guéniat, car sans eux ce récit n’aurait jamais été publié.
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