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L’ONG genevoise Civitas Maxima soutient les victimes oubliées de crimes internationaux en facilitant leur quête de justice. Cette série est adaptée de son rapport annuel 2024. Son fondateur, Alain Werner, explique comment, avec des moyens hélas modestes, l'organisation sort des sentiers battus des tribunaux internationaux pour porter – avec succès! – des quêtes de justice devant des tribunaux nationaux, et ce pour les pires crimes possibles. Un jour de 1993, dans un village reculé, situé à plus de 12 heures de voiture de Monrovia, la capitale du Liberia, une femme qu’on appellera Musu venait de perdre son enfant malade, âgé de quelques jours à peine. Elle-même était malade et ce n’était pas le premier enfant qu’elle perdait dans un pays alors en proie à une guerre civile d’une brutalité inouïe, avec un accès aux soins médicaux quasi inexistant dans les provinces.Le bébé fut enterré et un commandant du groupe rebelle qui contrôlait alors la région vint pour sympathiser avec la famille, donnant un peu d’argent, 100 dollars libériens (un demi-dollar américain), avant de quitter le village. Accusations de sorcellerie Mais peu après son départ, le commandant changea soudainement d’avis. Il rebroussa chemin, donna l’ordre à ses gardes du corps de traîner la mère en deuil hors de sa maison et l’abattit à bout portant d’une rafale d’arme automatique dans la tête, l’accusant d’être une sorcière. Il prit ensuite des feuilles de bananier du toit de la maison pour recouvrir le cadavre et y mit le feu.Les centaines de milliers de victimes des deux guerres civiles libériennes (1989-1996 et 1999-2003) ont été complètement abandonnées par leur propre gouvernement et par une communauté internationale incapable de faire en sorte – jusqu’à ce jour – que justice soit rendue au Liberia pour l’immense terreur infligée à la population civile sur plus de 10 ans. Le meurtre inutile et ignoble de Musu allait donc rester impuni, comme l’immense majorité des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité commis dans le monde.Mais la réalité de la justice internationale offre aujourd’hui de nouvelles perspectives. Le meurtre de Musu jugé à Paris Pour les victimes, les voies légales sont infiniment plus nombreuses de nos jours, dans les années 2020, qu’à la fin du siècle passé. Aujourd’hui, sous certaines conditions, elles peuvent demander justice dans des pays tiers, sans avoir à en passer par les tribunaux internationaux qui, bien souvent, ne font rien pour elles. Ce faisant, elles montrent la voie à d’innombrables autres victimes, dans d’autres contextes.C’est exactement ce que le mari et le frère de Musu ont fait, avec courage et détermination, pendant plusieurs années, dans une quête de justice que je vais vous décrire en détail dans cette Exploration de Heidi.news. Elle est issue, traduite et éditée du rapport annuel en anglais de l’ONG que je dirige, Civitas Maxima. Un espoir considérable Avec notre aide et celle de nos collègues libériens du Global Justice and Research Project, la famille de Musu a déposé une plainte pénale à Paris contre le commandant rebelle accusé de l’avoir abattue, ouvrant ainsi la voie à son arrestation et à son procès. Et le 27 mars 2024, après trois semaines d’audience, la cour d’Assises de Paris a confirmé en appel la condamnation de Kunti Kamara pour des crimes commis contre la population civile du comté de Lofa, y compris le meurtre de Musu.Kunti Kamara n’était pas français. Il n’avait rien fait de mal en France, ni contre des citoyens français. Mais il était accusé de crimes internationaux et vivait en France depuis deux ans au moment de son arrestation. Comme l’a dit une procureure française dans ses plaidoiries, la justice française ne l’a pas jugé à Paris «à la place» de la justice libérienne, mais «en l’absence» de justice dans ce pays. Cette dynamique est porteuse d’un espoir considérable. Elle permet de démultiplier les chances pour les victimes d’obtenir justice, de consolider et de développer de façon décentralisée, au niveau national, les normes qui nous protègent tous contre les crimes les plus graves.Parmi les personnes aujourd’hui accusées des crimes les plus graves devant des juges européens se trouvent aussi des ressortissants européens. En 2024, Manuel Terrén, un homme d’affaires espagnol qui vivait au Brésil, a été appréhendé en Espagne pour sa participation alléguée au commerce de diamants du sang en Afrique. Il s’agit de la première fois dans l’histoire légale espagnole qu’un ressortissant de ce pays est visé par une enquête pour des crimes internationaux. Budget modeste, résultats probants Depuis treize ans, sans avoir reçu ni sollicité aucun financement étatique, nous accompagnons ces quêtes de justice courageuses et novatrices en utilisant une variété d’outils juridiques. Cela a contribué d’une manière ou d’une autre à treize arrestations ou actes d’accusation et six procès dans quatre pays sur deux continents, dont cinq condamnations. Tout cela avec un budget total de moins de 15 millions de dollars en 13 ans, alors que le budget de la fameuse Cour pénale internationale (CPI) à La Haye dépassait les 200 millions de dollars pour la seule année 2024. En 23 ans, la CPI n’a pu condamner que huit personnes pour des crimes de guerre et/ou des crimes contre l’humanité.Cette année 2024 nous a également rappelé la complexité de notre travail, qui consiste à contribuer à des accusations de crimes internationaux contre des individus – des accusations qui portent un lourd stigma – pour des actes qui remontent parfois à des décennies et se sont déroulés dans des circonstances traumatiques pour ceux qui les ont vécus. Le contrecoup finlandais L’une des affaires dans lesquelles nous avions été impliqués a débouché en janvier 2024 sur la confirmation par une cour d’appel en Finlande de l’acquittement de Gibril Massaquoi, un ancien commandant qui était accusé de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité au Liberia entre 1999 et 2003, notamment des homicides, des violences sexuelles ainsi que le recrutement et l'utilisation d'enfants soldats. Nous avions fourni les premières allégations à la justice finlandaise contre Gibril Massaquoi, mais celle-ci l’a acquitté de tous les chefs d'accusation en estimant que les preuves n’étaient pas suffisantes.Depuis, ce dernier a reçu près de 400’000 euros de dédommagement alors que de notre côté, nous avons été la cible d’une violente campagne diffamatoire contre Civitas Maxima et ses partenaires, que je vous raconterai dans un des épisodes de cette série.Cependant, ces quêtes de justice menées indépendamment par des victimes devant des tribunaux nationaux sont un mouvement mondial en pleine croissance, que rien ne freinera. Ce mouvement est, à n’en pas douter, notre meilleur espoir pour faire en sorte que ces crimes de masse ne soient pas le quotidien des prochaines générations. Merci à tous ceux qui le soutiennent, et bonne lecture.
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