Maroc - LE TEMPS - Tous - 03/Jul 03:30

Comment le poison du crack a envahi les rues lausannoises

Estampillée «capitale suisse» de cette drogue, Lausanne découvre qu’elle n’est pas épargnée par le phénomène. Mais la réalité du terrain est bien différente de l’exemple genevois. Plongée dans le monde de la cocaïne fumée, entre consommateurs épuisés et commerçants excédésI. «Certains ne dorment pas pendant trois jours et trois nuits» Dehors, il serait l’un de ces visages émaciés que l’on évite quotidiennement dans les rues de Lausanne, regard mi-pressant, mi-suppliant, tandis que les lèvres prononcent les mots que l’on avait devinés à l’avance – «Z’auriez pas une petite pièce?» – avec une intonation d’urgence. Mais Bryan* se trouve à l’intérieur de l’Espace de consommation sécurisé de la Riponne, qui a ouvert ses portes en mai dans la capitale vaudoise. Malgré les taches de sang sur son sweat-shirt, malgré cet énorme bandage sale qui recouvre sa main droite, malgré sa dentition en bout de course et la sueur qui perle sur son front, il ressemble à beaucoup d’interlocuteurs soumis à des questions de journalistes, aimable, précis, soucieux de véhiculer des informations vérifiées. C’est qu’on est venus parler du crack, et le crack, Bryan connaît: durant quinze ans, il a fumé de la cocaïne «basée», soit portée à ébullition après avoir été dissoute dans de l’eau et du bicarbonate de soude ou (pire) de l’ammoniaque – jusqu’à 25 à 30 doses quotidiennes, assure-t-il. Aujourd’hui, Bryan s’injecte la coke, et il se dit moins angoissé: «Je suis redescendu à sept ou huit boulettes par jour. Quand je fumais, je n’avais pas fini la dernière taffe que je pensais déjà à la dose suivante.»Voir plus