Maroc - LE TEMPS - Tous - 11/Jun 18:12

Annulé en 2024, Cirque au Sommet joue sa survie

Après l’annulation du Vibiscum Festival de Vevey et du Segment Festival de Lausanne, au tour du festival valaisan de tirer la prise. La manifestation, au cadre spectaculaire, est en mauvaise posture financière. Mais les organisateurs n’ont pas dit leur dernier motChaque année depuis 2017, jongleurs, trapézistes et acrobates d’ici et d’ailleurs investissent Crans-Montana et ses hauteurs l’été venu, sous chapiteau ou à même l’alpage. Des numéros de haute voltige dans des décors à couper le souffle, avec, à la clé, un joli succès populaire – 10 000 spectateurs en 2022 et 8000 en 2023. Pourtant, cette année, les projecteurs resteront au placard, le festival est annulé.L’acrobatie a été jugée trop dangereuse. En sept ans, la manifestation du Haut-Plateau a cumulé pas moins de 400 000 francs de créances, indique Le Nouvelliste. Dans les colonnes du quotidien valaisan, son directeur Greg Zavialoff pointe le décalage entre une croissance portée par le public, les médias, les communes et le canton, et «une structure organisationnelle qui est restée minimale et qui manquait sans doute de la rigueur de gestion nécessaire à un événement ayant pris une telle ampleur».Découvrire notre Le grand guide des festivals de l'été 2024 ### Faillite ou rebond, un été sur la ligne de crête Au _Temps,_ Greg Zavialoff précise que l’année 2022 a sans doute été le coup d’accélérateur de trop. Alors que de nombreuses manifestations avaient lieu simultanément dans le canton dans un contexte post-pandémique, le festival invite plus de 20 compagnies à se produire, soit «presque autant que le Festival Circa, l’un des plus importants du genre en Europe. L’ambition a dépassé le cadre». Après les chanteurs du Vibiscum Festival de Vevey et les skateurs du Segment Festival de Lausanne, exit donc les artistes des cimes. Pour cette année du moins. Lire aussi: L’annulation du festival Vibiscum stupéfie Vevey Il n’est pas (encore) question ici de jeter l’éponge. L’été sera mis à profit pour procéder à une «analyse complète et profonde de la viabilité de la manifestation afin de construire une éventuelle édition 2025 sur des bases saines et pérennes», indique le festival. Dans le _Nouvelliste_, Greg Zavialoff évoque un potentiel repreneur. Des discussions sont en cours, fait-il savoir. «Aujourd’hui, nous souhaitons trouver une solution pour le festival et pour toutes les personnes qui ont des factures ouvertes, c’est cela le plus important», complète-t-il pour _Le Temps_. L’association se donne jusqu’à fin août pour y voir plus clair. ### «Les communes nous ont mis face à notre situation financière» Le soutien est-il aussi unanime que le festival laisse l’entendre? L’Association des communes de Crans-Montana, qui réunit Crans-Montana, Icogne et Lens, avait déjà sensiblement serré les cordons de la bourse en vue de cette édition. Son budget 2024, [public](https://www.cransmontana.ch/media/523512/20231017-budget-2024-fonctionnement.pdf), prévoyait d’octroyer 40 000 francs de subvention au festival contre 200 000 l’an passé. En cause: des crispations concernant la gestion financière de la manifestation, affirme un connaisseur du dossier. «Ce n’est pas à cause de la perte de cette subvention que notre situation financière va mal, c’était déjà le cas avant», reconnaît Greg Zavialoff. «Les communes nous ont fait confiance et soutenu dès le départ. Elles nous ont simplement mis face à notre situation», poursuit-il tout en précisant que l’Association des communes n’est pas fermée à l’idée de soutenir à nouveau l’événement pour autant que des solutions soient trouvées. «A nous de faire notre bout de chemin maintenant», appuie-t-il. Lire aussi: En dehors de l’Arc lémanique, plusieurs festivals ou salles de concert sont financièrement aux abois De son côté, le canton du Valais, qui a intégré le cirque aux dispositifs de soutien aux arts de la scène en 2015, dit prendre note de l’annulation et espère voir le festival «rebondir». Son Service de la culture a accordé au festival un montant global de 120 500 francs depuis 2020, pour l’aider à faire rayonner des compagnies de cirque valaisannes, précise le chef du service, Alain Dubois, au _Temps_. «On voit bien l’intérêt que le festival a pour la région de Crans-Montana et pour tout le canton. Il nous positionne fortement dans un secteur où nous sommes bien reconnus et où on a été pionniers», réagit le conseiller d’Etat Mathias Reynard, toujours dans le _Nouvelliste_. ### Turbulences estivales Cette annulation intervient dans un contexte de turbulences pour de nombreux festivals. Outre le Vibiscum et le Segment Festival, le Castrum (arts de la rue, Yverdon), le Belluard Bollwerk (arts vivants contemporains, Fribourg) ou encore le plusQ’île Festival (arts de la scène, Bienne, annulé en 2024), pour ne citer qu’eux, connaissent également le vertige des difficultés financières. A chaque canton, son écosystème et ses politiques de soutien public, mais quelques constantes tout de même, notait Philippe Trinchan, chef du Service de la culture de l’Etat de Fribourg, dans [_Le Temps_](https://www.letemps.ch/culture/scenes/en-dehors-de-l-arc-lemanique-plusieurs-festivals-ou-salles-de-concert-sont-financierement-aux-abois) la semaine dernière. «Entre l’inflation qui touche aussi bien les structures culturelles que les soutiens privés, les honoraires à la hausse légitimement exigés par les acteurs culturels et les contraintes de durabilité et d’accessibilité demandées aux lieux, une indéniable tension financière opère», détaillait-il, n’hésitant pas à parler de «changement de paradigme».