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Maroc Maroc - LE TEMPS - Tous - 17/Sep 16:20

Robert Dill-Bundi, sorties de piste

Le champion olympique de poursuite en cyclisme en 1980 à Moscou est décédé lundi à 65 ans. Dur au mal, courant le cachet sans s’économiser, il n’imaginait pas que de plus dures épreuves encore l’attendaient après sa carrièreL’annonce de la mort de Robert Dill-Bundi, le 16 septembre à l’âge de 65 ans des suites d’un cancer au cerveau contre lequel il lutta durant une grande partie de sa vie et qu’il avait fini par considérer comme «un compagnon», a renvoyé tous ceux qui avaient l’âge de se souvenir à un lieu, une date et une image. Moscou, été 1980, le vélodrome de Krylatskoïe, Robert Dill-Bundi à genoux embrassant la piste qui l’a fait champion olympique. «Enfin!» se dit-il, alors qu’il n’a que 22 ans.Le coureur de Chippis, colosse blond au visage poupon et aux cuisses d’acier, était du genre pressé. Quatre ans plus tôt, aux Jeux de Montréal 1976, auréolé de deux titres mondiaux juniors en poursuite, il se voyait déjà en or. Ses rêves s’effondrèrent lorsque ses entraîneurs le laissèrent seul sur la piste. «Ces enfoirés ne savaient pas à quel point c’était difficile, pour un jeune comme moi qui avait beaucoup d’ambition mais pas d’expérience, de gagner les Jeux. Je me suis fait rattraper par le futur champion olympique en qualification. J’étais tellement déçu que j’ai hésité à arrêter le vélo», dira-t-il en 2020 au Matin.Lire aussi: Les JO de Jacques Deschenaux: en 1980 à Moscou, à peine 2 francs le vol-au-vent au caviar Sa rage de vaincre, de s’en sortir, de triompher d’un destin mal embarqué lorsque tout jeune, son père l’abandonna lui et sa mère à un sort déjà précaire, l’amena en 1980 sur la piste du vélodrome de Moscou. Tous les cadors est-allemands et soviétiques étaient là, les Américains et une partie des Européens avaient boycotté, la présence de la Suisse s’était jouée à deux voix près. Cette fois, Dill-Bundi avait la volonté et l’expérience. Il avait aussi la piste, avec des virages parfaitement dessinés qui ne laissaient échapper aucun des kilowattheures produits par son coup de pédale surpuissant. ### Solitaire et fêtard C’est pour cela, pour la remercier, qu’il s’était agenouillé et avait pieusement embrassé le sol, conservant même un morceau de lame du parquet. Les photographes à l’affût lui firent refaire la scène, qui devint très vite l’une des deux images emblématiques de ces Jeux. Les Russes voulaient y voir un soutien au communisme et une réponse à l’autre photo mythique: le bras d’honneur du perchiste polonais Wladyslaw Kozakiewicz au public moscovite. Lire aussi: Les pistards suisses, derniers des purs Vu de Suisse, l’inscription de ce moment dans la mémoire collective tenait à autre chose. A la fascination qu’exerçaient cette combinaison latex rouge frappée d’une énorme croix blanche sur le dos et ce casque argenté profilé, mi-futuriste mi-militaire, qu’un concurrent éliminé lui avait prêté. Dill-Bundi, c’était aussi un nom étrange pour un Bas-Valaisan. A celui de son père (Dill), il avait ajouté celui de sa mère (Bundi) afin de l’honorer. Problème: l’un figurait sur ses papiers d’identité, l’autre sur sa licence de coureur cycliste, ce qui lui causa longtemps des problèmes. Il était de toute façon une tête qui dépasse, un cabochard capable d’imposer un train d’enfer tout un entraînement à ses coéquipiers parce qu’ils lui avaient refusé une sortie la veille au soir. Au pays des sportifs propres en ordre, il était d’une autre engeance, celle des solitaires et des fêtards. ![Une des images marquantes des JO 1980. — © STR/KEYSTONE](https://letemps-17455.kxcdn.com/photos/042b8be6-9c87-447a-8f41-a8d6b2019482/large "Une des images marquantes des JO 1980. — © STR/KEYSTONE") Il s’était mis au vélo à 14 ans parce que sa mère n’avait pas les moyens de lui offrir un boguet. Champion olympique, Robert Dill-Bundi ne roulait pas plus sur l’or qu’avant son titre, qui lui avait rapporté 10 000 francs, plus 2000 de prime, ainsi qu’une notoriété qu’il s’efforça d’abord de monnayer dans les Six Jours plutôt que dans une équipe professionnelle sur route. Aidé d’une petite équipe (mécano, assistant, masseur) qu’il rémunérait lui-même et partageait avec deux autres coureurs, il courait le cachet dans les vélodromes du nord de l’Europe, où la discipline tenait lieu de kermesse et de dîner-spectacle. Le rythme est éreintant. Dans un _Sous la loupe_ de 1980, le journaliste de la RTS Bertrand Duboux fait les comptes: «Huit heures de présence, cinq heures de selle, 150 km par jour.» Plus tard, il attribuera ses problèmes de santé à ces cadences infernales et aux chutes, une dizaine par an, souvent sur la tête. ### Miraculé puis maudit En 1999, il a mis fin à sa carrière (émaillée tout de même d’un titre mondial au keirin en 1984, d’une victoire d’étape au Giro en 1982 et d’une participation au Tour de France en 1986) depuis une dizaine d’années lorsqu’on lui détecte pour la première fois une tumeur «grosse comme un œuf» au cerveau. Il est opéré mais le mal revient en 2001. Il se croit guéri, sa fille le trouve plus gentil qu’avant, il rêve de s’installer à Cuba avec sa nouvelle épouse et puis la tumeur revient en 2006. Inopérable cette fois. Pour une raison qu’il ignorera toute sa vie et qui le taraudera longtemps, il bénéficie d’un traitement expérimental à base d’impulsions électriques. Chauve, le crâne recouvert d’électrodes reliées à une batterie qu’il transporte en permanence dans une petite sacoche, il est méconnaissable. Mais vivant. Lire aussi: Pascal Richard, clap-clap de fin Au siège de l’UCI, à Aigle, où on lui a trouvé une place d’agent d’entretien sans rapport avec son passé et ses compétences, il laisse ceux qui ont fait bien moins que lui se vanter le midi à la cafétéria. Il répète sa chance d’être «un miraculé» mais parle peu de son titre olympique. «De toute façon, pour moi c’était fini dès que je suis descendu du podium», avait-il dit un jour. Sa vie bascule définitivement en 2013. Alors qu’il s’apprête à quitter son emploi à l’UCI et la Suisse pour s’installer à Cuba, il provoque un terrible accident de circulation au volant de sa BMW qui portait une inscription «à vendre». Pris d’un malaise sans doute lié à ses problèmes de santé (son médecin lui avait déconseillé de conduire), il fonce à 200 km/h, le pied coincé sur l’accélérateur, dans le centre d’Aigle, percutant sept voitures, blessant 11 personnes dont une très gravement. Lui a le sternum brisé et des remords plein la tête. Au moment de son procès en 2015, il est rentré de Cuba sans argent et sans épouse. Reconnu coupable de lésions corporelles simples par négligence, lésions corporelles graves par négligence, violation grave des règles de circulation, conduite malgré une incapacité, il est condamné à 90 jours-amendes avec sursis. Celui qui avait embrassé la piste du vélodrome de Moscou survivra encore à un arrêt cardiaque avant de mettre définitivement les deux genoux à terre.

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