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Depuis la chute de Bachar el-Assad, les prisons syriennes, de sinistre réputation dans tout le Moyen-Orient, se vident de leurs occupants. Les prisonniers les plus affectés, brisés par les tortures et les mauvais traitements, atterrissent à l’hôpital où défilent les familles à la recherche de survivants.Elle est assise là sur un vieux fauteuil roulant. Ses cheveux ont été rasés. Elle porte un pull-over d’enfant, rouge avec un ours dessiné. Sa maigreur est terrifiante. Son regard vide, totalement vide. En creux, il raconte l’horreur. Il est le témoin des ténèbres d’où cette femme a été libérée par les rebelles.Je ne peux pas vous écrire son prénom, son nom, ni même son âge.Posée là, en attendant Cette ex-détenue des prisons de Bachar el-Assad ne parle plus. Elle ne prononce aucun mot, pas même un murmure. Alors, pour lui rendre sa dignité, pour qu’elle ne soit plus le numéro de détenu que ces geôliers lui avait attribué, je lui ai trouvé un prénom: Amal, «espoir» en arabe. Comme tout ici, il est provisoire, mais ces quatre lettres participent à lui rendre l’humanité que le système répressif d’un dictateur sanguinaire lui a arraché.Amal n’est plus de notre monde. Le sien, depuis des années, était fait de violence, de privation et d’humiliation. Elle y a laissé son âme. L’ancienne prisonnière fait tourner sur l’un de ses doigts une bague d’enfant. Le fin bijou brille sur sa peau sale. Amal est sortie de sa cellule la veille mais depuis, personne ne l’a lavée. Elle a juste été posée sur un fauteuil roulant et abandonnée dans une petite salle de l'hôpital Ibn Al-Nasif, au nord de Damas, avec deux autres anciens détenus. Le défilé des endeuillés Depuis des heures, Amal voit défiler des mères, des pères, des enfants à la recherche d’un proche… Ils agitent des photos de leurs disparus devant elle, avec toujours la même question: où étais-tu incarcérée, dans quelle prison? A chaque fois, Amal détourne lentement le regard, et penche légèrement sa tête, absente. Alors, personne ne s’attarde sur son sort ou ne la réconforte.A la recherche de leurs proches depuis des années, ces familles semblent incapables de ressentir sa souffrance, tant la leur est immense. Elle est la victime de l’indicible, victimes d’horreurs que très peu de gens auront la force d’écouter si Amal parle un jour. Notre monde ne supporte pas ces récits venus des abîmes.J’ai du mal à détacher mon regard d’elle. Pourquoi personne ne vient la soigner? La nettoyer? La rassurer? Dans le couloir, une jeune neurologue avoue son impuissance face au chaos. Elle est inquiète: Amal et les deux autres détenus ont la tuberculose. Ils doivent être isolés de la foule et pris en charge. Pendant des années, entassés dans des cellules, ces syriens n’ont pas vu la lumière. Ils ont été torturés, affamés et violés. Le prénom de son bourreau Allongé sur un brancard, un vieil homme parvient à peine à bouger. Chacun de ses mouvements est une douleur. Lui se souvient de son prénom: Bachar. Mais trois jours après sa libération, sa famille ne s’est pas encore manifestée. Impossible de lui donner un âge. Il porte les stigmates de l’enfer. Les phalanges de trois doigts de sa main gauche ont été sectionnées. Bachar me fixe et me saisit le bras: «Je suis fatigué, tellement épuisé. Je n’ai même plus la force de parler». Une infirmière arrive à son chevet, une feuille à la main. Désorientée, elle ose à peine le regarder. Quelques secondes plus tard, la jeune femme tourne les talons, laissant Bachar seul au milieu de la cohue. L’homme laisse échapper un râle. Un cri de désespoir que personne n’entend.
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