Le ténor polonais Arnold Rutkowski se glissera dans la peau du Prince Andreï Khovanski dans Khovantchina de Modeste Moussorgski, à l’affiche du...
Vous n'êtes pas connecté
La mezzo-soprano américaine, qui chantera Marfa dans Khovantchina, évoque la difficulté de mémoriser des rôles en russe, ses craintes liées à l’élection américaine et le réveil de l’opéra contemporain aux États-Unis, notamment à New York, qui s’ouvrent à la représentation des minoritésRacontez-nous votre rencontre avec le chant lyrique J’ai toujours aimé la musique. Mes deux parents sont originaires de Jamaïque. Ils ont déménagé au Canada pour faire leurs études et mes sœurs sont nées là-bas. Pour que mon père puisse faire son école de médecine, ma famille s’est installée au Mexique où je suis née. Nous y avons vécu jusqu’à mes six ans et ensuite nous sommes partis vivre aux États-Unis. Ma mère chantait du répertoire sacré à l’église et des chansons traditionnelles. C’est elle qui a fait notre éducation musicale avec mes sœurs, en nous faisant apprendre le piano. J’ai ensuite joué du violon et de la clarinette. Lorsqu’elle était enseignante au lycée, j’ai commencé à m’intéresser au répertoire qu’elle faisait écouter à ses élèves et c’est comme cela que j’ai découvert toutes les grandes comédies musicales. Je me souviens être restée des heures à la bibliothèque plongée dans West Side Story et Le Fantôme de l’Opéra. C’est en tombant un jour par hasard sur un disque d’Olga Borodina que j’ai découvert le chant lyrique. J’étais fascinée par le son qui sortait des haut-parleurs. C’était comme être face à un extraterrestre.J’ai néanmoins commencé des études de commerce. Une fois à l’université, ma mère qui m’entendait toujours beaucoup chanter m’a poussée à prendre des cours. Ma première professeur Soohong Kim, en entendant ma voix brute, m’a tout de suite incitée à abandonner mes études et à me présenter dans sa classe. C’est ce que j’ai fait et il n’y a pas eu de retour en arrière. J’avais 19 ans. C’est drôle parce que Khovantchina est l’opéra que j’ai écouté au Met il y a une vingtaine d’années lorsque j’étudiais à la Manhattan School of Music, avec Cynthia Hoffmann. Et c’est dans cet opéra que j’ai vu pour la seule et unique fois chanter Olga Borodina. J’ai gardé le souvenir d’une musique obsédante. Stylistiquement, il y a quelque chose de l’ordre d’une hantise et un désir latent de retour vers la maison, au sens universel. Raehann Bryce-Davis en Azucena dans une production du Trovatore de Verdi à l’Opéra de Los Angeles, qui a marqué la réouverture du théâtre après la pandémie. — © Allen J. Schaben / Los Angeles Times via Getty Images Comment aborde-t-on une telle partition, notamment au niveau de la langue ? Chanter en russe est toujours un défi en termes de mémorisation. Lorsque j’ai décroché mon tout premier emploi professionnel à Anvers en 2017, il y avait au programme de la saison Sadko de Rimski-Korsakov. J’y chantais le rôle de Nezhata et Dmitri Jurowski dirigeait la production. Travailler avec un chef d’orchestre russe met à l’épreuve toute votre intelligence pour utiliser vos ressources profondes. En amont du travail d’une partition, il y a souvent un sentiment d’accablement. Quatre heures d’opéra à mémoriser semble toujours impossible au départ. Dès la première répétition scénique, tout ce qui a été enfoui dans le cerveau au cours de la préparation se propage pour progressivement faire partie de vous. Ce n’est pas la première fois que vous chantez à Genève… C’est drôle car le tout premier rôle que j’ai chanté en Europe, c’était au Grand Théâtre de Genève en 2015. Je faisais partie de la production de Porgy and Bess du New York Harlem Theatre et Genève était notre première étape de tournée. En décembre de cette année-là, au moment de quitter le Texas pour me rendre en Suisse, je n’avais pas utilisé mes bottes de neige depuis de nombreuses années et j’ai débarqué pour cette production avec un énorme trou dans ma botte. Impossible de m’en dénicher une paire à ma taille sur place. J’ai passé tout mon séjour avec les pieds glacés ! Cinq années après la pandémie de Covid 19 qui a particulièrement impacté les institutions musicales aux États-Unis, comment vivent les musiciennes et musiciens de l’autre côté de l’Atlantique ? C’est toujours difficile. Le marché était déjà très concurrentiel, et tout a été rendu encore plus compliqué. On observe une plus grande frilosité chez les organisateurs qui prennent moins de risques avec de jeunes chanteurs. Aujourd’hui je me considère comme privilégiée de pouvoir travailler et vivre du chant. Je suis également très reconnaissante d’avoir passé toutes mes années musicales formatrices en Europe, notamment à l’Opéra Ballet de Flandre à Anvers. J’aime la liberté artistique qui existe. On y trouve des maisons lyriques très créatives, à l’inverse de celles aux États-Unis où le public a encore une vision très traditionnelle du chant lyrique, avec les robes de bal, les décolletés…Mais l’Amérique est mon pays et j’aime aussi y travailler parce qu’il est plus facile pour ma famille d’y voyager et de me soutenir. Ces dernières années, il y a un élan incroyable dans les maisons d’opéra pour mettre en lumière l’opéra contemporain. L’an dernier, j’ai fait partie du casting de The Life and Times of Malcom X d’Anthony Davis au Metropolitan de New York. D’ordinaire, l’Amérique est réservée aux vieux mâles blancs… Présenter cet opéra au Met a été moment historique, pour repenser la place et la représentation des Afro-Américains sur scène. Cet opéra s’inscrivait dans la démarche profondément contemporaine et politique du Met. On sent que les choses bougent et d’ailleurs tout le mouvement drag-queen s’empare aussi du répertoire opératique. On le voit par exemple avec Sapphira Cristál qui a participé à l’émission RuPaul Drag Race l’année dernière et sa reprise de l’air de Puccini « O mio babbino caro ». Alors évidemment les snobs de l’opéra seront toujours contrariés de la récupération de cet art élitiste par les masses populaires, mais pour ma part je trouve ce signal encourageant. De manière plus générale, l’Amérique se trouve dans une situation d’ouverture en matière de reconnaissance et d’évolution de la place dans la société des personnes LGBTQ+ et des personnes racisées. Je suis très enthousiaste à ce sujet. Raehann Brace-Davis a participé à plusieurs créations, telles que We Call the Roll d’Anthony Davis, Come, My Tan-Faced Children de Melissa Dunphy ou Sanctuary Road de Paul Moravec. Au Metropolitan Opera de New York, elle a chanté dans The Life and Times of Malcom X d’Anthony Davis, un ouvrage qui témoigne de la vitalité de la création lyrique aux États-Unis. — © DR Mais l’élection récente de Donald Trump ne vous inquiète pas justement pour les droits des minorités en général ? Qui plus est, la culture semble le cadet de ses soucis… Vous avez raison. Il n’y a pas d’autre façon de décrire cela. C’est terrifiant en tant qu’être humain d’assister à la célébration de personnes qui ont tué des Noirs. À la première élection j’étais encore plus terrifiée. Ce n’était pas quelque chose que nous attendions après Barack Obama et comme beaucoup d’Américaines, j’étais choquée. Avant que Donald Trump n’accède une nouvelle fois à la présidence, j’ai fait tout ce que je pouvais pour que le pays ne prenne pas cette direction. Je me suis investie dans du bénévolat, j’ai assisté au grand meeting de Kamala Harris à Houston, j’ai discuté des heures durant pour convaincre des gens. Mais c’est la démocratie et une majorité a pleinement choisi cette voie. Plus largement, au niveau international, nous vivons des heures très sombres avec des mouvements d’extrême droite de plus en plus présente et décomplexée. Je fais maintenant le choix d’investir dans mes projets et dans la musique que je veux faire. J’essaye de sublimer ma protestation, qu’elle devienne mon essence artistique, et je me concentre sur les gens que j’aime. Que peut-on faire d’autre ? Aujourd’hui les réseaux sociaux sont devenus des outils de communication indispensables aussi pour les artistes. Comment gérez-vous les vôtres ? En effet, il faut déployer beaucoup de temps et d’efforts pour avoir des médias sociaux dynamiques. Et ce n’est pas idéal car cela peut empiéter sur le travail proprement artistique. Mais ce que j’apprécie, c’est que les chanteurs d’opéra avaient l’habitude de compter sur des managers pour les représenter auprès des médias qui nous mettaient en valeur et nous présentaient sous un éclairage toujours fabuleux. Je crois que ce qui a profondément changé c’est que le public et la nouvelle génération ne sont plus en quête de la perfection lisse sur papier glacé. Paradoxalement, les réseaux nous rendent un peu plus vivants et parfois imparfaits. Même si le contrôle que nous exerçons en permanence sur notre propre image a quelque chose de vertigineux. Raehann Bryce-Davis a fait des débuts remarqués au Metropolitan Opera de New York en 2022 dans le rôle de Baba la Turque dans The Rake’s Progress de Stravinsky. Après des études de chant au Texas puis à la Manhattan School of Music, à New York, la mezzo-soprano a gagné plusieurs prix (dont le célèbre George London en 2018). Elle s’est illustrée dans plusieurs grands rôles chez Verdi (Eboli, Azucena qu’elle chante cette saison à Houston) et dans le belcanto. Après Marfa dans Khovantchina au Grand Théâtre, elle se produira dans l’autre grand opéra de Moussorgski, Boris Godounov, à Amsterdam, dans la mise en scène de Kirill Serebrennikov. Elle produit également des vidéos musicales. La première, To the Afflicted, a été retenue comme vidéo officielle du World Opera Day. La seconde, Brown Sounds, a été désignée meilleure vidéo musicale de l’année dans de nombreux festivals, de New York à Cannes. Khovantchina au Grand Théâtre de GenèveDu 25 mars au 3 avril 2025 Site Billetterie
Le ténor polonais Arnold Rutkowski se glissera dans la peau du Prince Andreï Khovanski dans Khovantchina de Modeste Moussorgski, à l’affiche du...
Voici une sélection, ce 8 mars 2025, des derniers propos tenus par des centristes dans les médias ou sur les réseaux sociaux en France. ►...
Voici une sélection, ce 27 février 2025, des derniers propos tenus par des centristes dans les médias ou sur les réseaux sociaux dans l’Union...
Lors de sa visite aux Etats-Unis et de sa rencontre avec Donald Trump à Washington, Emmanuel Macron a développé la position française mais aussi...
Voici une sélection, ce 26 février 2025, des derniers propos tenus par des centristes dans les médias ou sur les réseaux sociaux en France. ►...
Football - Elephants - CANA la tête des Eléphants durant deux années, Jean-Louis Gasset avait quitté le navire après la désillusion face à la...
“Lorsque j’étudiais, je rampais pour aller à l’étage au lycée. J’ai fait l’université aussi au troisième étage. Le plus souvent,...
Voici une sélection, ce 7 mars 2025, des derniers propos tenus par des centristes dans les médias ou sur les réseaux sociaux dans l’Union...
Les prix ne cessent de grimper depuis plusieurs années. Entre panique et organisation, les Belges multiplient les astuces pour diminuer le prix du...
Voici une sélection, ce 2025, des derniers propos tenus par des centristes dans les médias ou sur les réseaux sociaux en France. ► Emmanuel...