Maroc - LE TEMPS - Tous - 12/Jun 17:31

La Nati, de la Suisse dans les idées

ÉDITORIAL. La grande évolution du football sur trente ans, c’est que la filière d’élite s’est éloignée de plus en plus tôt de la pratique amateur. Un petit pays qui travaille bien avec ses meilleurs talents peut rêver de grandes chosesComme chaque année paire, le début de l’été va être rythmé par un grand tournoi de football, en l’occurrence le Championnat d’Europe, organisé par l’Allemagne du 14 juin au 14 juillet. La Suisse sera de la fête, dans le groupe du pays hôte avec également la Hongrie et l’Ecosse. On s’attend à ce que des myriades de supporters de la Nati débarquent en Allemagne, comme ce fut le cas lors de la Coupe du monde 2006, et l’on espère que les joueurs de Murat Yakin nous enthousiasmeront comme ils l’ont fait lors du précédent Euro.Nous nous sommes habitués à voir l’équipe de Suisse dans le concert des meilleures nations. Pour une fédération aussi vieille que l’Association suisse de football (ASF), fondée en 1895, c’est un phénomène assez récent: trente ans tout juste, avec une continuité accentuée depuis vingt ans. De nombreux articles et un film ont ravivé le souvenir de la qualification historique pour la Coupe du monde 1994 aux Etats-Unis, qui mettait fin à vingt-huit ans de disette. Dans ce cahier spécial, Le Temps a préféré s’attarder sur tout ce qui a suivi, une période fondatrice marquée par la vision d’une poignée de dirigeants, techniciens, entraîneurs, éducateurs.La grande évolution du football sur trente ans, c’est que la filière d’élite s’est éloignée de plus en plus tôt de la pratique amateur. Le niveau d’une équipe nationale n’est plus déterminé par son nombre de licenciés mais par la pertinence de sa politique de formation. Des petits pays bien organisés, avec une vision claire, des moyens financiers et des règlements adaptés sont devenus très bons. La Suisse, qui comptait une dizaine d’entraîneurs professionnels pour les juniors dans tout le pays en 1994, en dénombre aujourd’hui plus de 200. Ce récit des Trente Glorieuses de l’équipe de Suisse est en creux un hommage au courage, à la détermination et à la passion. Les responsables de l’ASF et de la Ligue nationale (devenue Swiss Football League) ont osé prendre des décisions fortes et ont maintenu le cap dans les périodes difficiles. Ils ont su également adapter leur approche et n’ont jamais perdu de vue l’importance du rapport humain lorsqu’il s’agit d’obtenir le meilleur de jeunes gens en pleine construction personnelle. Les signaux qui nous parviennent aujourd’hui indiquent que cet héritage est menacé par le confort et le conformisme. L’âge moyen de la Nati augmente, le nombre de joueurs suisses qui s’imposent dans les grands championnats européens diminue, un vieux projet de centre national refait surface sans autre vision que «faire comme les autres». Pour que nous vivions d’autres étés enchantés, il est primordial que le football suisse continue d’avoir de la suite dans les idées. Notre grand récit de ces Trente Glorieuses: Du Mondial 1994 à l'Euro 2024: comment, en trois décennies, l’équipe de Suisse de football a banalisé l’exceptionnel