Maroc - LE TEMPS - Tous - 05/Sep 14:07

Initiative biodiversité: l’USP se trompe de cible

OPINION. Le député écologiste Alberto Mocchi ne comprend pas l’opposition de l’Union suisse des paysans. Pour le secrétaire de Pro Natura Vaud, le texte soumis au vote fait converger les intérêts écologiques et agricolesAlors que la campagne sur l’initiative pour la biodiversité bat son plein, les nombreuses banderoles appelant à refuser le texte ayant fait leur apparition dans les champs fraîchement moissonnés laissent quelque peu songeurs…A lire les slogans parlant de risques pour notre approvisionnement alimentaire ou sur la mise sous cloche de 30% de nos terres agricoles, on pourrait croire qu’il s’agit d’une énième initiative visant le monde paysan, et la manière de travailler et de produire de nos agricultrices et agriculteurs.Or, quand on se penche sur le texte de l’initiative, on s’aperçoit que le terme agriculture n’y figure nulle part, tout comme d’ailleurs tout objectif chiffré de protection. Il y est tout simplement et très pragmatiquement demandé que les cantons et la Confédération s’engagent à préserver les paysages et les sites naturels, à ménager la nature et le patrimoine bâti et à mettre à disposition les surfaces, les ressources et les instruments nécessaires pour ce faire. Ce fameux 30% tant décrié ne provient donc pas du texte de l’initiative, mais d’engagements internationaux pris par notre pays. La Conférence de Montréal sur la biodiversité, organisée par les Nations unies, a mené en 2022 à un accord prévoyant notamment la conservation et la gestion efficaces d’au moins 30% des terres, des zones côtières et des océans de la planète. Un refus dans les urnes de l’initiative pour la biodiversité n’y changera donc absolument rien. ### On aimerait voir l’USP se battre pour des prix équitables et contre les marges de la grande distribution De là à dire que l’Union suisse des paysans se trompe de cible en combattant l’initiative, il y a un pas que je franchis volontiers. Bien sûr, les récentes mobilisations paysannes ont montré une fois encore comment ce secteur est sous pression, et combien le travail des paysans est devenu difficile, entre baisse des prix des denrées agricoles, bureaucratie croissante et dangers liés aux changements climatiques. Si nous voulons garder une agriculture productrice dans notre pays, leurs revendications doivent être écoutées, et des mesures prises rapidement. On aimerait cependant voir l’USP se battre pour des prix équitables payés aux producteurs, et contre les marges trop importantes pratiquées par la grande distribution avec la même ferveur qu’elle met à combattre l’initiative pour la biodiversité! Les relations entre écologistes et monde agricole ne sont certes pas au beau fixe, et des initiatives comme celles sur les pesticides, à la communication sans doute parfois maladroite, ont été vécues par de nombreux agriculteurs comme des attaques directes contre leur travail. Faire de l’écologie le bouc émissaire de tous les problèmes de l’agriculture ne résoudra cependant rien du tout! ### La biodiversité va mal dans notre pays! Beaucoup de magnifiques initiatives ont été prises ces dernières années dans nos campagnes en faveur de la biodiversité, et notre agriculture en fait effectivement déjà beaucoup. Reconnaître cela ne veut cependant pas dire qu’il faut renoncer à davantage de moyens pour protéger une biodiversité qui va mal dans notre pays! Agriculture et protection de l’environnement ont des intérêts parfois divergents, mais la plupart du temps convergeant tout à fait, peu de secteurs d’activité étant aussi tributaires du climat et de la nature pour leur bon fonctionnement. Espérons donc qu’un dialogue constructif puisse se mettre en place rapidement entre ONG environnementales et faîtières agricoles, loin de tout «ya ka» et diables peints inutilement sur les bottes de foin.