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Maroc Maroc - LERAL.NET - Actualité National - Hier 22:12

LE HANDICAP, A L’HEURE DE L’EVALUATION

La nécessaire mise en cohérence des politiques sociales avec la Vision Sénégal 2050 a amené le Chef de l’Etat à rappeler et à instruire le Gouvernement quant à la place primordiale qu’il convient d’accorder aux personnes vivant avec un handicapLa nécessaire mise en cohérence des politiques sociales avec la Vision Sénégal 2050 a amené le Chef de l’Etat à rappeler et à instruire le Gouvernement quant à la place primordiale qu’il convient d’accorder aux personnes vivant avec un handicap dans toutes les politiques d’équité et d’inclusion sociale, lors du Conseil des ministres du 27 novembre 2024. Le fait est qu’après avoir ratifié la Convention des Nations-Unies relative aux droits des personnes vivant avec un handicap en 2008, les autorités sénégalaises ont voté la loi d’orientation sociale n° 2010-15 du 06 juillet 2010, relative à la promotion et à la protection des droits des personnes vivant avec un handicap, conformément aux dispositions de ladite Convention. Cette loi qui précise l’orientation et le cadre juridique des personnes vivant avec un handicap, qui présentent des incapacités physiques, mentales, intellectuelles ou sensorielles durables, dont l’interaction avec diverses barrières peut porter atteinte à leur pleine et effective participation à la société sur la base de l’égalité, précise en son article 5 que  » sont considérées comme obligations nationales, les politiques publiques de l’Etat, nécessaires à la prévention des handicaps, leur traitement, leur prise en charge, la réadaptation, l’éducation, la formation professionnelle, l’insertion socio-économique et l’intégration sociale des personnes vivant avec un handicap ». Mais si cette loi comprend neuf dispositions à édicter par décret, l’Etat n’a pris depuis lors que deux décrets relatifs aux commissions départementales et à l’éducation spéciale, alors que la signature des décrets prévus par la loi assure absolument une pleine intégration et une participation effective des personnes vivant avec un handicap comme souligné dans les résultats du rapport d’évaluation de la politique nationale du handicap (2022, DPPPH). L’article n°3 de la loi d’orientation sociale impute au ministère chargé de l’Action sociale l’obligation de délivrer à toute personne vivant avec un handicap une carte spécifique dénommée « carte d’égalité des chances », sur proposition des commissions techniques mises en place depuis 2012, mais force est de constater qu’en douze années, ledit ministère n’a produit que près de 100.000 cartes, pour une population d’environ un million cinq cent mille personnes handicapées. C’est pourquoi, il convient d’accorder une attention particulière à la directive du Chef de l’Etat relative à l’évaluation du processus de délivrance de la carte d’égalité des chances et à l’obligation pour le Sénégal d’identifier une stratégie nationale de promotion des personnes handicapées. Si la « carte d’égalité des chances » permet à son titulaire de bénéficier des droits et avantages en matière d’accès aux soins de santé, de réadaptation, d’aide technique, financière, d’éducation, de formation, d’emploi, de transport, ainsi qu’à tout autre avantage susceptible de contribuer à la promotion et à la protection des droits des personnes vivant avec un handicap, le processus de production empêche les personnes vivant avec un handicap de bénéficier de tous leurs droits. Le processus de production semble souffrir de l’approche utilisée ainsi que de l’absence d’une base de données, mais aussi d’un instrument fiable. Il est impossible de concevoir des politiques publiques et des interventions coconstruites et inclusives en l’absence d’une base de données. Les outils utilisés par l’Agence nationale de la statistique et de la démographie (ANSD) par rapport au recensement des personnes vivant avec un handicap, dont celui du Washington group, se révèlent peu pertinents, car omettant de fait certaines catégories de personnes vivant avec un handicap, dont les Albinos et les personnes de courte taille, encore que certaines barrières socioculturelles cachent à autrui certains types de handicap. Il est dès lors essentiel de confier cette étape de recensement et de dénombrement aux Centres de Promotion et de Réinsertion sociale, animés par des travailleurs sociaux, par ailleurs formés et spécialisés dans l’accompagnement et la réinsertion sociale des personnes vivant avec un handicap, conformément aux dispositions de l’article n°9 de la Convention n°159 de l’O.I.T. Le second obstacle à la mise en place de politiques et d’interventions inclusives relève de l’absence d’un instrument d’identification des personnes vivant avec un handicap et de mesure du handicap. Il convient avant tout d’accepter à la suite des travaux de Verena KECK associés à ceux de l’équipe de recherche composée de Fatima HALANTINE et GUNVOR Berge et de M.Mbodj (2022) que  le handicap dépend des contextes culturels et socioculturels dans lesquels il émerge, ce qui autorise à retenir en définitive une approche situationnelle en termes d’instrument de mesure du handicap. En conséquence, le verbe « être handicapé » devrait être posé de la manière suivante: –       Handicapé dans quelle situation? –       Dans quelle situation suis-je handicapé? –       Dans quelle situation es-tu handicapé? –       Dans quelle situation est-il handicapé? Mais pour en arriver là, il a fallu passer par différentes manières de percevoir et donc de définir le handicap, dépendamment de notre représentation de l’Homme, notamment dans sa relation avec l’environnement. Le modèle individuel est essentiellement biomédical car cantonnant tout phénomène observé au niveau du corps uniquement, et la maladie étant bien entendu perçue comme un enchainement causal, que l’on retrouve à l’origine de la Classification Internationale des Maladies et des problèmes de santé connexes (C.I.M.), O.M.S. Genève 1993. Les limites du modèle individuel dit curatif, relèvent de la diminution des maladies infectieuses du fait de l’antibiothérapie, de l’accroissement des maladies chroniques, de la baisse de la mortalité infantile et du vieillissement de la population, le tout provoquant un accroissement des guérisons avec séquelles, ce qui met en évidence les limites du modèle curatif. En 1975, les Nations Unies ont adopté la Déclaration des droits de la Personne Handicapée, pour proclamer ensuite 1981, « Année Internationale des Personnes Handicapées », marquant ainsi le début du programme de la « Décennie des Nations Unies pour la personne Handicapée ». C’est suivant cette dynamique que sera élaborée la classification des conséquences des maladies, avec une première classification internationale des Handicaps (C.I.H.) en 1980 en Anglais par l’O.M.S., pour être traduit en Français en 1988.L’objectif vise à fournir une meilleure information sur les conséquences des maladies, sans aucune compréhension de la globalité du phénomène du handicap, ce modèle se présentant comme un modèle causal. Les recherches effectuées depuis 1987 par le Comité québécois et la Société canadienne sur la CIDIH (CQCIDIH-SCCIDIH) ont mené à l’élaboration d’une proposition expérimentale d’une nouvelle classification (FOUGEYROLLAS et al. 1989, 1991, 1993, 1995, 1996). Cette proposition basée sur une approche positive et interactive, décrit le processus de production des situations de handicap. Ce nouveau modèle démontre qu’une situation de handicap devrait être considérée comme étant le résultat situationnel d’un processus interactif impliquant deux séries de variables causales: –        d’une part les caractéristiques de la personne c’est-à-dire ses déficiences et ses incapacités découlant de maladies, traumatismes ou autres troubles; –        d’autre part les caractéristiques physiques ou socioculturelles de son environnement créant des obstacles ou facilitant sa participation sociale dans une situation donnée: vie familiale, emploi, éducation, loisir etc. Le problème du processus de production de la carte d’égalité des chances au Sénégal se trouve dans l’option C.I.H. et C.I.V., qui référent tous les deux à l’approche médicale, laquelle ne figure pas sur la loi d’orientation sociale. Le recours à un médecin spécialisé en qualité d’expert peut être requis exceptionnellement par la commission départementale d’accréditation, mais ne constitue nullement une condition de délivrance de la carte. La M.HA.VIE met l’accent sur la situation de participation sociale et situation de handicap qui correspondent au degré de réalisation des habitudes de vie, résultant de l’interaction entre d’une part, des déficiences, des incapacités et des autres caractéristiques personnelles et d’autre part, de facilitateurs ou des obstacles environnementaux (Mbodj, 2022).Le nombre restreint d’outils sur la mesure des handicaps et des facteurs environnementaux a incité à développer la « mesure des habitudes de vie (MHAVIE) » et la « mesure de la qualité de l’environnement » ainsi que de favoriser leur utilisation avec des personnes vivant des conséquences à long terme des maladies et traumatismes. L’option pour un processus interactif de production du handicap et son outil qu’est la M.HA.VIE impose la stratégie de réadaptation à base communautaire, précisée par le document d’orientation conjoint sur la RBC du Bureau International du Travail (BIT), de l’UNESCO et de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), avec les objectifs suivants : – Faire en sorte que les personnes handicapées puissent maximiser leurs aptitudes physiques et mentales, accéder aux services et opportunités offerts à toute la population et devenir des contributeurs actifs à la communauté et à la société dans son ensemble, par la conscientisation ; – Dynamiser les communautés pour qu’elles promeuvent et protègent les droits humains des personnes handicapées, par le renforcement des capacités des familles et la création et l’organisation de nouvelles structures au sein des communautés ; – Mobiliser les communautés autour du handicap en termes de prévention et de promotion de la santé. Il s’agit en définitive, d’une stratégie de développement communautaire visant la réadaptation, l’égalisation des opportunités et l’intégration sociale de toutes les personnes handicapées, qui est mise en œuvre grâce aux efforts conjugués des personnes handicapées elles-mêmes, de leurs familles et de leurs communautés. La participation de la communauté est toujours nécessaire pour promouvoir et respecter les droits de l’homme des personnes handicapées et leur permettre de devenir des membres actifs de la société. La collaboration entre les différents organismes, secteurs et professionnels est essentielle à tous les niveaux pour appuyer cette approche globale de la réadaptation. Les professionnels de la santé collaborent avec les individus et les populations locales à la planification, au fonctionnement et à la surveillance des services. Elle est aujourd’hui envisagée comme une stratégie destinée à assurer aux personnes handicapées l’inclusion, les droits et l’égalité des chances. Sa pratique est passée d’une approche essentiellement médicale de prestation de services, souvent focalisée sur un seul domaine (comme la santé ou l’éducation), à une approche multisectorielle basée sur les droits. Deux points de stratégie devraient être pris nécessairement en compte lors de la conception d’une nouvelle stratégie de prise en charge des personnes handicapées : –        la famille comme unité d’analyse et d’intervention de manière à rejoindre les dispositions de l’article n°17 de la Constitutions du Sénégal ; –        le respect des dispositions de l’article n°3 du Code Général des Collectivités territoriales, en rendant aux commissions techniques départementales leurs prérogatives en matière de conception et de mise en œuvre de la compétence transférée Action sociale, laquelle devrait être logée au ministère en charge du développement communautaire. Je voudrais pour conclure, voir par cette adresse du Président de la République, une matérialisation du « jubanti » en matière de droits humains et de justice sociale, puisqu’il sera surtout question enfin, de l’affirmation d’une réelle volonté politique de changement au bénéfice d’une frange importante de la population exclue et marginalisée de tous les dispositifs d’intégration sociale, malgré l’existence d’un cadre juridique. Et pour terminer, mettre en cohérence la politique nationale du handicap, compétence transférée, avec le nouveau référentiel des politiques publiques en logeant la direction au département en charge du développement communautaire et de la Solidarité nationale. Rokhaya DIALLOSource Logo: Le SoleilPrimary Section: OpinionsArchive setting: Unique ID: Daouda TOUMBOU - Titre corrigé par Farid Source : https://www.seneplus.com/opinions/le-handicap-lheu...

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